" Par passion pour cette vieille maison de la fin du XVIIIe siècle où j'ai fait mes premiers pas, je suis devenu casanier. Quelles que soient les difficultés de l'existence, c'est là - maison et jardins - que je me sens le mieux. "
C'est ainsi que parle ce mayennais, né en 1933.
Parole récolté dans le cahier spécial de la revue 303 *
- revue de la région Pays de la Loire - ( 44 + 53 +85 +49 +72 ),
Cahier édité en son honneur, lors de l'année Jean-Loup Trassard, en 2010.
Si j'avais déjà lu quelques Trassard, c'est dans mes formations " Ateliers
d'écriture " que j'ai vraiment rencontré l'univers Jean-Loup Trassard, et ce,
grâce à une formidable passeuse de textes, la poète Albane Gellé.
Ai rencontré son univers et plus encore, habité !
J'ai longtemps désiré, comme quelque chose de viscéral,
rencontrer l'auteur sur son lieu de vie.
Dès que j'ai formulé mon projet de feuilleter la France à la rencontre de ceux qui font le livre, j'ai pensé Jean-Louis Trassard, avec l'espèce d'urgence de l'âge avancé de l'auteur.
J'avais l'envie de relier ses paysages à ses pages.
Me plaisait l'idée de retrouver son Espace Antérieur, ses souvenirs de la lenteur, de l'ennui, tous reliés à son périmètre d'enfance, cette grande maison, son jardin, son potager, son verger et le tout doublé de fermes.
Sans doute des échos à ma propre enfance, vacances à la ferme de mes grands-parents et à ma curiosité des lieux de vies.
Je me suis souvent servie de ce livre pour mes ateliers Histoires de Vies.
Des images animées, des souvenirs réanimés, des espaces élargis et surtout un regard chantant la beauté de la campagne animée. Si la nature sauvage a été souvent chantée, le vrai travail agricole, lui n'a guère eu accès à la littérature.*
Tout autour de son manoir, l'enfant unique ira fureter le ruisseau, le fossé, ira voir ceux qui savent faire, le paysan, le forgeron, ceux qui ne sont de son milieu social.
L'enfant, l'adolescent, le jeune adulte, iront se mêler aux travaux des champs mais garderont l'œil observateur et poétique.
D'ailleurs l'enfant consignera ces impressions dans un cahier bleu offert par sa mère. Il expérimentera le plaisir du langage et moi c'est bien cette langue que j'aime, ce travail d'écriture pour dire le simple, le devant nos yeux...
Oui j'ai habité ces livres plus que ne les ai lus.
J'ai retrouvé mes sensations d'errance dans les campagnes que je ne savais comment dire, mes souvenirs aussi ou ceux que mes grands - parents de la ferme me racontaient.
Alors oui, je décidais de rencontrer celui qui partageait sa vie entre Paris et la Mayenne, qui une fois dans sa maison de Saint-Hilaire, bougeait peu de chez lui et voyait peu de monde.
Un courrier envoyé, une réponse téléphonique de Jean-Loup Trassard,
une joie en moi, une intimidation, un doute.
Malgré cela, nous avancions vers chez lui, dans le Haut Mayennais ...
Quand sur ce chemin, on nous posait la question où allions - nous, je répondais avec affirmation " Voir Jean-Loup Trassard "
- Vous le connaissez personnellement ?
- Heu non mais ...
Au musée de l'évolution agricole de Juvigné, on le connaissait bien
La gardienne du lac aussi ...
Des mots sur lui, sur son père, fermier des droits communaux et puis des silences aussi, silences que j'aurais peut-être dû entendre.
Jean-Loup Trassard m'avait dit de ne pas venir pour lui, mais enfin si vous passez par là ... mais ne venez pas exprès, vous savez je ne vois guère de monde, et puis je suis en pleine écriture
J'approchais le monde de Jean-Loup Trassard par cercles concentriques
mais à l'inverse de son exploration à lui.
Enfant il passait de sa chambre, à l'intérieur de la maison, aux jardins, à la ferme des voisins, et aujourd'hui il ne sillonne guère plus de 8 km autour de chez lui, restant dans son canton. Lui, du cœur à l'extérieur .
Moi, nomade, je partais à sa rencontre, de l'extérieur à son chez lui ...
Rencontre avec l'élevage de la Meule percherons . Quelques années plus tôt, le café était en activité.
( A suivre ...)
